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Gaza pour la Palestine : Contextualiser la Grande Marche du Retour

lundi 16 avril 2018, par Louise Desrenards (Traduction), HAIDAR EID (Auteur)

« La Grande Marche du Retour » est un événement non violent organisé et préparé depuis le mois de janvier 2018 à l’initiative de Yusri Darwish, qui dirige l’Union des centres culturels palestiniens, par le front uni pluraliste des organisations palestiniennes, associations de la société civile, et mouvements de la jeunesse, qui s’est doté d’un comité national de 28 membres où le Hamas est représenté comme les autres à raison d’un membre. L’événement a lieu chaque vendredi à Gaza depuis le 30 mars et jusqu’au 15 mai, date des 70 ans de la Nakba qui frappa les Palestiniens non Juifs en 1948. En dépit d’une répression atroce par les snipers et l’artillerie israéliens la foule persiste à se rassembler par milliers au fil des semaines. (L. D.)


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Carlos Latuff
Source @Mondoweiss 14 Avril 2018


A u cours des 10 dernières années, Israël a lancé trois grandes guerres d’agression sur la bande de Gaza occupée, beaucoup de nos civils ont été massacrés par des bombardements aveugles — condamnés par des experts de l’ONU et des organisations de défense des droits de l’homme comme crimes de guerre et "possibles" crimes contre l’humanité. Ces assauts ont fait plus de 3 800 morts palestiniens, principalement des civils, dont des centaines d’enfants. 15 000 autres Palestiniens, ont été blessés. Nous, les 2 millions de Palestiniens de la bande de Gaza assiégée, dont la grande majorité sommes des réfugiés qui fument violemment expulsés et dépossédés de nos foyers par les forces sionistes en 1948, avons été soumis à trois semaines (2009), deux semaines (2012) et 51 jours (2014) de terrorisme d’État israélien implacable, où les avions de guerre israéliens ont systématiquement ciblé des zones civiles, réduit des quartiers entiers et des infrastructures civiles vitales pour en faire des décombres et détruit des dizaines d’écoles, dont plusieurs dirigées par l’UNRWA. Ceci survint après des années d’un siège médiéval meurtrier par les Israéliens contre Gaza, une forme grave de punition collective décrite par Richrad Falk, ancien rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l’homme, comme un « prélude au génocide ».

Afin de comprendre la mentalité derrière les massacres de dizaines de civils, y compris les enfants, qui se déroulent actuellement aux frontières de Gaza, il suffit de lire les réponses des généraux et des politiciens israéliens. Le ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, après que des soldats israéliens aient abattu 32 Palestiniens entre les 10 jours de manifestations non-violentes et pacifiques de réfugiés exigeant la mise en œuvre de la résolution de L’ONU 194 qui inscrit leur droit de retour et au rapatriement [1], et la fin des onze ans de siège mortel de Gaza. Lieberman a déclaré qu’il n’y avait « aucun innocent » dans la bande de Gaza. Lieberman a affirmé que « tout le monde est lié au Hamas, tout le monde reçoit un salaire du Hamas » [2]. Sa déclaration est venue un jour avant que son armée ne dise dans un tweet : « Rien n’a été fait de façon incontrôlée ; tout était précis et mesuré, et nous savons où chaque balle a atterri ».

On ne peut que relire une déclaration faite en 2008 par l’ancien vice-ministre israélien de la Défense, Matan Vilnai, qui déclara à la radio militaire que « Ils [les Palestiniens de Gaza] apporteront sur eux une plus grande « shoah » parce que nous utiliserons toute notre force pour nous défendre. » [3]

C’est une mentalité conduite par une idéologie fanatique qui ne voit pas l’humanité de « l’Autre » et dénie son droit à l’autodétermination et liberté ! Ce sont des « bêtes bipèdes » (Menachem Begin), et des « sauterelles » qui par dessus-tout doivent être écrasées (Yitzhak Shamir).

Et comme si 11 années de blocus, interrompues par trois guerres génocidaires, ne suffisaient pas, l’attaque contre Gaza n’est pas encore terminée : les Palestiniens de Gaza vivent toujours avec leurs blessures physiques, mentales et émotionnelles. Leurs corps ne peuvent pas guérir parce que les médicaments nécessaires ne sont pas autorisés dans la bande de Gaza. Leurs maisons ne peuvent pas être reconstruites et l’acier et le béton déchiquetés ne peuvent pas être enlevés parce que les camions et les bulldozers qui peuvent les enlever et les matériaux pour reconstruire ne sont pas autorisés à entrer dans la bande de Gaza. Jamais auparavant une population n’a été autant privée des conditions de base pour sa survie venant d’une politique délibérée de colonisation, d’occupation et d’apartheid, cependant c’est ce qu’Israël fait contre nous, la population de Gaza, aujourd’hui : 2 millions de personnes vivent sans eau potable, la nourriture, l’électricité, les médicaments manquent, et près de la moitié d’entre elles sont des enfants de moins de 15 ans.

C’est un « génocide incrémental » d’un genre inégalé dans l’histoire humaine [4].

Pas surprenant, alors, que des militants anti-apartheid comme Ronnie Kasrils, ex-ministre sud-africain des Renseignements et membre de l’ANC, et feu Ahmed Kathrada, un dirigeant de l’ANC et détenu à Robben Island avec Nelson Mandela, ou encore le Nobel de Paix l’archevêque Lauréat Desmund Tutu, considèrent que ce que fait Israël aux Palestiniens est bien pire que ce qui a été fait aux noirs sud-africains sous l’apartheid. Même l’ancien président américain Jimmy Carter, lors de sa visite à Gaza, a explicitement déclaré que le peuple palestinien pris au piège à Gaza était traité « comme des animaux ».

NOUS EN AVONS MARRE !

Nous sommes arrivés à la conclusion que notre combat sur le terrain avec une série de marches culminant le 15 mai, jour du 70e anniversaire du Nakba, peut poser un grave problème au système d’occupation d’Israël, de colonisation et d’apartheid, s’il est soutenu par une campagne mondiale de Boycott de Désinvestissement et de Sanctions. Nous avons besoin de citoyens ordinaires du monde pour montrer à Israël que nous avons une humanité commune ; qu’il voit ce qu’il fait, et qu’ils ne le tolèrent pas parce que le silence serait complice ; qu’il n’y a pas de place pour sa sorte de guerre et de barbarie dans le monde et que les gens du monde rejettent cela. C’est exactement ce que l’anti-apartheid mondial a réussi à faire dans les années 70 et 80 du siècle dernier jusqu’à l’effondrement du système inhumain d’apartheid. Il est temps de résister au seul régime d’apartheid restant dans le monde ; pour cela, nous devons être unis.

Gaza, le 12 avril, 2018

Haidar Eid


Article source en anglais « Contextualizing the Great March of Return », by Haidar Eid, on April 12, 2018 Mondoweiss.

Traduction par Louise Desrenards.


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Source https://www.bdsfrance.org/


P.-S.

L’iconographie est du caricaturiste brésilien engagé © Carlos Latuff et extraite du magazine en ligne Mondoweiss. Twitter @LatuffCartoons.

Lien :

Haidar Eid, « Decolonizing Palestine » Social Text Online (15 novembre 2016).


Notes

[1] NDLE : une traduction intégrale de la résolution 194 du 11 décembre 1948 est accessible en document pdf dans le site de l’ONU — pp. 21-24, colonne droite : « UN French Documents ».

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UN résolution 194
11 décembre 1948

[2] Tovah Lazaroff, « There are no innocents in Gaza, says Israeli defense minister » The Jerusalem Post, 8 avril 2018.

[3] Nidal al-Mughrabi,« Israel warns Gaza of "Shoa" », Reuters, 29 février 2008.

[4] Ilan Pappe, « Israel’s incremental genocide in the Gaza ghetto » electronic intifada, 13 juillet 2014.

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