- Un aspect de la bande de Gaza non reconstruite en 2016
Source © The Citizen
GAZA : Le secrétaire d’État sortant, John Kerry, a prononcé un discours le 28 décembre dans lequel il a déploré que la solution à deux États au « conflit israélo-palestinien » soit défunte. (La raison pour laquelle j’utilise ici des guillemets inversés est parce que ce qui y est caractérisé comme un conflit est en réalité un cas classique de colonisation de peuplement associée à l’apartheid, par conséquent on n’a pas deux partis face à face, à moins qu’on ne considère l’apartheid sud-africain comme un “conflit” entre « les Africains natifs et les colonialistes de la suprématie blanche » !)
Le point principal de Kerry est que la solution à deux États soit en danger à cause de la politique israélienne de construction des colonies de peuplement. Les États-Unis, comme il le dit, veulent garder ouverte la possibilité d’établir un État palestinien viable. Il ignore toutefois le fait qu’Israël ait déjà tiré dans la tête de la solution à deux États en étendant les colonies existantes, en annexant Jérusalem, en construisant le monstrueux mur de l’apartheid, et en faisant de la Bande de Gaza le plus grand camp de concentration sur terre, avec deux millions de détenus vivant dans des conditions pires que des animaux, comme le Président Jimmy Carter le décrivit à propos de sa visite à Gaza, tout ceci ayant laissé les Palestiniens quasiment sans territoire sur lequel ils pourraient établir un « État ».
En outre, Kerry ignore essentiellement que la solution à deux États soit une solution raciste par excellence. En fait, l’État palestinien fictif auquel il fait allusion est pire que les infâmes bantoustans de l’apartheid sud-africain.
Mais le plus important, je pense, c’est sa « solution » à la question des réfugiés, en laquelle il propose une solution « agréée » ignorant le principe que le droit de retour de tous les réfugiés palestiniens soit garanti par le droit international, conformément à la résolution 194. Il n’y a pas de solution à la question palestinienne sans garantir le droit de retour des réfugiés.
Et il finit par réitérer l’engagement de l’Amérique envers la sécurité d’Israël, ignorant que ce sont les Palestiniens [qui n’ont pas pas le pouvoir] qui doivent être protégés de la politique israélienne du colonialisme de peuplement, du nettoyage ethnique et de l’occupation. Il n’est donc pas étonnant que le titre d’un journal israélien émérite, Haaretz, dans la rubrique d’opinion « Op-Eds », soit : « Le discours de Kerry était superbement sioniste, pro-israélien et trois ans trop tard ! » — bien que là ne soit pas ce que pense le gouvernement d’extrême droite de Netanyahu.
Enfin, utiliser la solution à un seul État — c’est-à-dire un État laïque démocratique pour tous ses citoyens, — pour en faire un effrayant corbeau, est à la hauteur de l’hypocrisie. Les États-Unis eux-mêmes sont un État démocratique laïque, de même que l’Afrique du Sud. Pourquoi est-ce si effrayant d’avoir cette alternative, au lieu d’une solution raciste ? On pourrait penser, par la façon dont les politiciens américains continuent à défendre la solution raciste à deux États, qu’ils n’aient pas conscience que l’unité nationale des États-Unis elle-même soit constituée par cinquante États indépendants !
Le monde entier est contre Israël, mais nous, les Palestiniens, comment allons-nous construire là-dessus ? La réponse vient purement et simplement de la campagne BDS palestinienne : un boycott total contre Israël et le désinvestissement constituent la solution, ainsi que contre les sociétés étrangères qui bénéficient de son système d’oppression à plusieurs niveaux — à savoir l’occupation, la colonisation et l’apartheid, — et imposer les sanctions jusqu’à ce que ce pays soit conforme au droit international.
En deux mots, ce dont nous, Palestiniens, nous avons besoin maintenant, c’est d’une diplomatie de la résistance ◼
Errata : sur la situation matérielle immédiate on peut lire la lettre de Ziad Medoukh « Crise de l’électricité et de l’eau à Gaza » dans La revue des ressources.