WWW.CRITICALSECRET.NET — - - —
Home page > CRITICALSECRET_LES CARNETS MENSUELS_THE MONTHLY NOTEBOOKS > 2013 OLIVIER HADOUCHI @ Carnet de mars-avril_Notebooks of March/April > #OlivierHadouchi EDITORIAL Retour vers de tumultueux printemps  ? / Return (...)

#OlivierHadouchi EDITORIAL Retour vers de tumultueux printemps  ? / Return towards the tumultuous springtime?

Tuesday 2 April 2013, by Olivier Hadouchi, Michel Belisle (Author - Translator)

[rouge]A[/rouge] près un trop long hiver, étrangement persistant, cap vers un printemps placé sous le signe de la redécouverte du cinéma de Jocelyne Saab (Liban, Égypte…) et du souvenir des tumultueuses années 1960 et 1970 en Amérique latine. [  ]

[brun]A[/brun] fter a very long winter, one that tried to claim permanent residency, it is time to head for a new spring season under the sign of rediscovery: the cinematographic work of Jocelyne Saab (Lebanon, Egypt ...) and memories of the tumultuous 60s and 70s in Latin America.  ]


[ Fr - En ]


La Hora de los hornos


[rouge]Q[/rouge] uand Jocelyne Saab tourne son premier long-métrage, Le Liban dans la tourmente, co-réalisé avec Jörg Stocklin en 1975, l’Amérique latine est en proie à de sanglantes dictatures, sur fond d’unification de la répression sous l’égide du Plan Condor, et le Liban entre dans une guerre qui durera plus de quinze ans. Durant pratiquement toute la décennie 1970, sur le sous-continent latino-américain, « L’heure des brasiers » [1], annoncée en 1968 par les cinéastes argentins Octavio Getino [2] et Fernando Solanas (dans La hora de los hornos, sous le signe du Che, de Fanon et de la geste des libérateurs du XIXe siècle tels que Simon Bolivar, José Marti ou San Martin), a laissé place à l’heure des cendres et du désarroi. Le 11 septembre 1973, le coup d’État du Général Pinochet met un terme brutal à l’Unité Populaire, un gouvernement d’union de la gauche élu démocratiquement et dirigé par Salvador Allende (qui préfèrera se suicider plutôt que se rendre à la junte), tandis qu’en Uruguay, juste quelques mois auparavant, un régime militaire prenait le pouvoir de la même manière, en déclenchant aussi une large répression contre la gauche et ses sympathisants. Au Liban, l’espoir d’une victoire de la gauche libanaise alliée aux Palestiniens et d’un profond changement (social et politique) est anéanti dès l’année 1976, l’année où l’Argentine bascule à son tour dans la dictature, dirigée par une junte militaire, après des mois particulièrement chaotiques et des dizaines d’exécutions extra-judiciaires via les escadrons de la mort. Dès 1967, telle une Cassandre en proie au chaos et à la destruction, la poétesse et artiste Etel Adnan prédisait l’« apocalypse arabe » (qui deviendra le titre d’un poème publié en 1973), un parcours semé d’embûches, allant « de défaites en défaites », à rebours d’un certain optimisme — le monde n’était-il pas entré dans « l’heure des brasiers » et de la création de « deux, trois… de nombreux Vietnam » comme l’avait préconisé le Che dans son Message à la Tricontinentale [3] rendu public en 1967, quelques mois avant sa disparition en octobre de la même année ? — et des rêves de libération vite balayés. Toutefois, on peut se poser la question suivante : qu’est-ce qui pourrait rapprocher le regard de la cinéaste libanaise Jocelyne Saab et celui de tel cinéaste argentin, chilien ou uruguayen ? Peu de choses, serions-nous tenté de dire, à l’exception de l’influence d’un grand documentariste quelque peu oublié ou plutôt, désormais, beaucoup moins bien considéré par les cinéphiles de ma génération (née dans les années 1970) et des suivantes : un certain Joris Ivens. Comme Fernando Solanas ou Mario Handler, Jocelyne Saab est une grande admiratrice de l’art documentaire d’Ivens. Et si, pour certains spectateurs, le cinéma de Joris Ivens demeure encore (trop) lié par endroits aux régimes staliniens et maoïstes (en somme, de l’art au service de zélées propagandes), il est intéressant de signaler que parmi les cinéastes cubains ayant choisi de s’exiler, après avoir été formés au début des années 1960 par le fameux globe-trotter, beaucoup ont gardé une grande affection pour lui, disent avoir beaucoup appris grâce à son enseignement. Sans oublier, et c’est important, la volonté de (re)découvrir et d’arpenter son propre pays, en se confrontant à ses contradictions, ses divisions et ses fêlures, qui rapproche la démarche de Jocelyne Saab d’un Fernando Solanas et d’un Octavio Getino, par exemple.


JPEG - 28.2 kb
Jocelyne Saab, Irak: La guerre au Kurdistan (1973)
Iraq: War in Kurdistan (1973)
© Jocelyne Saab, (Source facebook Nicole Brenez)


[rouge]É[/rouge] taient-ce l’intervention de Jocelyne Saab dans le documentaire de Ferid Boughedir consacré aux « caméras arabes », la mention de son nom et de ses films dans d’anciennes revues de cinéma, ou le fait de savoir qu’elle avait tourné au Liban, à plusieurs reprises, durant la guerre ? J’étais curieux de voir ses images et de découvrir son cinéma. J’ai pu le faire en 2010, et cela a très vite donné lieu à une série d’entretiens avec elle, de conversations autour de son travail — bien trop peu connu en France, — qui m’apparaissait comme quelque chose de nécessaire et de marquant. Son œuvre possède une profonde cohérence, elle débute en 1973, dans le contexte du journalisme et du reportage télévisuel, tandis qu’elle couvre divers conflits du Proche Orient (en Syrie, en Irak, en Iran, et bien sûr au Liban, à maintes reprises), et en 1975, avec Le Liban dans la tourmente, elle enregistre le basculement de son propre pays, qui s’engouffre alors vers la guerre en toute insouciance, quasiment avec le sourire aux lèvres et une bonne dose d’inconscience, comme le déclarait la cinéaste lors de la séance d’ouverture de la rétrospective du cycle « Jocelyne Saab, les astres de la guerre » (dans le cadre des séances de Nicole Brenez : « Cinéma d’avant-garde, contre-culture générale »), le 29 mars dernier à la Cinémathèque Française. On sait ce qu’il est advenu ensuite, sans être en mesure de parvenir entièrement à évaluer l’ampleur du désastre et des conséquences de la guerre, dans toutes ses dimensions. La tension ressurgit régulièrement, le pays a dû faire face à des campagnes d’assassinats ciblés et des bombardements israéliens (pensons à la guerre de l’été 2006), le chaos syrien a et aura sans doute de grandes répercussions sur le Liban, sur la région entière.


JPEG - 79.2 kb
Jocelyne Saab, Les enfants de la guerre (1976)
Children of War (1976)
Capture d’écran / Screen snapshot
© Jocelyne Saab (Source Cinémathèque française)


[rouge]L[/rouge] a guerre n’a-t-elle pas dévasté les rêves d’enfance, saccagé ce « grand jardin » qu’était Beyrouth — dans son imaginaire d’adolescente, — anéanti les espoirs de Jocelyne Saab et de larges franges d’une génération avide de liberté et de changement social ? C’est sans doute la raison pour laquelle son cinéma arpente la ville et le pays entier avec autant de tendresse et de compassion. Tellement de lieux de son passé, à commencer par sa maison, qui abritait ses scénarios de films et tellement de souvenirs familiaux n’auront pas survécu à la guerre. Dans ses films, elle a su pourtant capter et magnifier l’âme et l’architecture de villes ou de villages, se mettre à l’écoute des survivants, restituer la poésie et l’ambiance particulières d’un lieu donné, se réapproprier sans cesse un espace dévasté, en rencontrant parfois le murmure impassible de la mer. Chaque souvenir restitué est une victoire contre l’anéantissement de la guerre, la défiguration d’un pays.

[rouge]E[/rouge] t s’il fallait esquisser la définition du cinéma de Jocelyne Saab, nous dirions que son œuvre, qui s’apparente au parcours d’une cinéaste dans la tourmente, se caractérise par les motifs et les éléments suivants : le combat pour la vie contre tout ce qui mutile, tente d’emprisonner, empêche les hommes (les femmes et les enfants) de s’épanouir, la conquête du droit à raconter et à transmettre une histoire en toute liberté.

« [rouge]I[/rouge] l faut découvrir, il faut inventer » écrivait Frantz Fanon (citation placée en exergue du manifeste Vers un troisième cinéma de Solanas et Getino, paru 1969). Or, il ne s’agit assurément pas de revisiter sans regard critique certains films de ces années de braise et de feu, tels des icônes achevées — figées dans un ailleurs « hors de portée » — des vestiges d’un âge d’or (désormais) inatteignable, prisonnier d’une pulsion nostalgique et mystifiante, mais de redécouvrir tout un corpus englouti, comme « pudiquement » recouvert dans (et par) les années 1980, dans les décennies d’après. D’effectuer un retour sur des parcours filmiques, des expériences de libération qui se métamorphosèrent souvent en expériences de l’éparpillement (exils des uns et des autres), sur fond de villes défigurées, devenues lointaines ou absentes.

[rouge]R[/rouge] edécouvrir, en somme, pour mieux réinventer ?


Olivier Hadouchi


JPEG - 43.6 kb
La hora de los hornos (1968)

Fernando E. Solanas
et Octavio Getino
Couverture du DVD
reprise de l’affiche
(source remoto.tv.com)

(cliquer sur l’icône pour accéder au poster)


Remerciements :
Pour les autorisations de reprises de textes ou d’images, je remercie vivement Nicole Brenez, Jocelyne Saab, Lionel Soukaz, et bien sûr Louise Desrenards pour son travail titanesque en si peu de temps.



Now! - version intégrale du court métrage documentaire de Santiago Alvarez
sur la lutte des Noirs pour leurs droits civiques aux USA (5’25, 1965)


Now! - Powerful short documentary on the struggle for civil rights of Black people
in the United States in the 1960s. (Source F0guinho)


[ En - Fr ]

[brun]W[/brun] hen Jocelyne Saab directed her first feature film, Lebanon in Turmoil, co-directed with Jörg Stocklin in 1975, Latin America was crushed by bloody dictatorships against a wall of repression unification under the Condor Plan. Meanwhile, Lebanon was at war, one that lasted more than fifteen years. Throughout most the 70s in Latin America, “The hour of the fumaces” [4], announced in 1968 by the Argentine filmmakers Octavio Getino [5] and Fernando Solanas (in La hora de los hornos, in the era of Che, Fanon and epic liberators of the nineteenth century such as Simon Bolivar, José Marti or San Martin), lead to destruction and despair. On September 11, 1973, the coup of General Pinochet abruptly ended the Popular Unity, a governing union of the left led by the democratically elected Salvador Allende (who chose to commit suicide rather than surrender to the junta); a few months before in Uruguay, a military regime took over in the same way triggering also a wide repression against the left and its sympathizers. In Lebanon, the left Lebanese, ally to the Palestinians, hope for victory and a profound social and political change, was brought to an end in 1976, the year when Argentina fell under dictatorship led by a military junta, after many months that proved particularly chaotic with dozens of extra-judicial executions committed by death squads. From 1967, a Cassandra lost in chaos and destruction, namely the poet and artist Etel Adnan, predicted the “Arab Apocalypse” (which became the title of a poem published in 1973), a risky series of steps from “defeats to defeats” against some optimism—wasn’t then the world being under the "hour of fires, creating “two, three if not more Vietnams,” as had Che advocated in his Message to the Tricontinentale [6], made public in 1967 a few months before his death in October of the same year? —Dreams of liberation were quickly obliterated. However, one can ask: what could bring the eyes of the Lebanese filmmaker Jocelyne Saab and those of filmmakers in Argentina, Chile or Uruguay? Little, we would be tempted to say, with the exception of the influence of a great documentary filmmaker, Joris Ivens, somewhat forgotten by now and much less regarded by film enthusiasts of my generation (born in 1970) and those coming afterwards. Like Fernando Solanas and Mario Handler, Jocelyne Saab is a great admirer of the documentary art of Ivens. And if, for some viewers, his work remains (too) connected to the Stalinist and Maoist regimes (in short, the art at the service of zealous propaganda), it is interesting to note that among the Cuban filmmakers who chose exile, having been trained in the early 60s by the famous globe-trotter, many have retained a great affection for him and said they have learned a lot from his teachings. Not to mention, and this is important, the desire to (re) discover by means of travelling within one’s own country, of confronting its contradictions, its divisions and gaps, leading to believe that the process of Jocelyne Saab is close to that of Fernando Solanas and a Octavio Getino, for example.


JPEG - 28.2 kb
Jocelyne Saab, Irak: La guerre au Kurdistan (1973)
Iraq: War in Kurdistan (1973)
© Jocelyne Saab, (Source facebook Nicole Brenez)


[brun]W[/brun] as it the intervention of Jocelyne Saab in the documentary by Ferid Boughedir devoted to the “Arab cameras,” or her name and her films mentioned in old film magazines, or the knowledge that she had filmed in Lebanon on several occasions during the war? I was curious to see her pictures and explore her work in general. I was able to do so in 2010 which quickly led to a series of interviews with her, conversations about her work—far too little known in France—which seemed like something necessary and outstanding. Her work is highly coherent, beginning in 1973, in a context of television journalism and reporting, while covering various conflicts in the Middle East (repeatedly in Syria, Iraq, Iran, and Lebanon of course), and in 1975, Lebanon living in turmoil, she documented the peculiar fall of her own country, one that occurred light-headedly, quite unconsciously, into a state of war, as the filmmaker said at the opening session of the retrospective cycle of “Jocelyne Saab, under the signs of war” (as part of Nicole Brenez’s sessions “Avant-Garde Cinema, General Counter-Culture”), on the 29th of March at the French Cinemathèque. We know what happened then, without being able to fully assess the extent of the disaster and the consequences of the war in all its dimensions. Tension re-emerges regularly. The country has faced campaigns of targeted assassinations and bombings from Israel (let’s remember the war in the summer of 2006), the Syrian chaos has and probably will have major repercussions on Lebanon and, to some extent, on the entire region.


JPEG - 79.2 kb
Jocelyne Saab, Les enfants de la guerre (1976)
Children of War (1976)
Capture d’écran / Screen snapshot
© Jocelyne Saab (Source Cinémathèque française)


[brun]I[/brun] sn’t it war that devastated childhood dreams, wrecked Beirut, this “great garden”—as imagined like a teenager would—crushed Jocelyne Saab’s hopes, like most of her own generation craving for freedom and social change? This is probably the reason why her film wanders through the city and the whole country with such tenderness and compassion. So many places she used to know well, starting with her home, which concealed her screenplays and so many family memories, most of which have not survived the war. In her films, she captured and magnified the soul and architecture of cities and villages, listened to survivors, recalled the poetry and the precise atmosphere of a specific place, always reclaiming devastated space, sometimes passing by the impassible murmur of the sea. Every recollection is a victory against the results of a destructive war and a disfigured country.

[brun]I[/brun] n order to outline the definition of Jocelyne Saab’s film curriculum, we would say that her work, which is similar to the story of a filmmaker caught in a storm, is characterized by patterns and elements: the struggle for life against anything that maims, imprisons, and prevents men, women, and children to thrive; the quest for the right, and freedom, to tell a story.

[brun]W[/brun] e must discover, invent” wrote Frantz Fanon (a quote from the manifesto Towards a third cinema by Solanas and Getino, published in 1969). However, it is not suggested to revisit some of these movies from those years of embers and fire without a critical eye as if they had become self-sufficient icons—frozen and unreachable—remains of a (now) unattainable golden age, trapped by some mystifying nostalgic impulse, but to rediscover with deference a whole corpus engulfed in (and by) the 80s and subsequent decades. Travel back to those filmic journeys whrn liberating experiences often were subjected to a metamorphosis, provoking fragmentation (separation and exile), where disfigured cities served as distant or absent backdrops.

[brun]R[/brun] ediscover to somehow better reinvent?

Olivier Hadouchi
Unpublished translation into English by Michel Belisle


JPEG - 43.6 kb
La hora de los hornos (1968)

Fernando E. Solanas
et Octavio Getino
Couverture du DVD
reprise de l’affiche
(source remoto.tv.com)

(Click on the icon to get to the poster)

Acknowledgments:

For reproduction permissions of texts and images, I would like to gratefully thank Nicole Brenez, Jocelyne Saab, Lionel Soukaz, and of course Louise Desrenards for her gigantic effort accomplished in such a short time.


* Si le tweet qui apparaît dans la fenêtre d’envoi est trop long, (le nombre de signes en excès apparaissant dessous, précédé de : "-") le raccourcir avant de l’envoyer, en prenant soin de ne pas supprimer le lien même de l’article. / * If the content of the tweet is too long (the number of characters in excess is indicated by a negative value), please shorten it and make sure you do not crop the link.


P.S.

- En logo, l’affiche de l’artiste cubain Alfredo Rostgaard, pour le film cubain révolutionnaire et en quelque sorte inventant le langage postmoderne des video-clips, Now ! de Santiago Álvarez, (1965).
- The logo, a poster by the Cuban artist Alfredo Rostgaard created for the revolutionary Cuban film that somehow invented the postmodern language of video clips, Now! Santiago Alvarez (1965).

- Le manifeste de Getino et Solanas traduit en français sous le titre Vers un troisième cinéma (éditeur et revue cineaction) n’a pas été rendu accessible sur Internet probablement pour des raisons de droits (?). Voici la version bilingue sous deux documents téléchargeables en pdf, en espagnol et en anglais, et deux documents également téléchargeables du Message de Che Guevara à la Tricontinentale (1967), en anglais et en français :

PDF - 147 kb
Hacia un tercer ciné

Octavio Getino
Fernando E. Solanas
PDF - 119.2 kb
Towards a Third Cinema
Octavio Getino
Fernando Solanas


PDF - 110.4 kb
Message à la Tricontinentale
Che Guevara
Source marxists.org
PDF - 55.6 kb
Message to the Tricontinental
Che Guevara
Source marixists.org

Footnotes

[1] Titre français du film manifeste argentin La Hora de los hornos (1968, distribué en 1973), de Octavio Getino et Fernando E. Solanas. Comme l’auteur l’indique dans son éditorial, en fait ce titre cite une phrase du grand révolutionnaire cubain — et plus largement caraïbe — du XIXe siècle, José Martí, écrivain et combattant militaire indépendantiste, tué lors d’une charge menée contre l’armée espagnole à la bataille de Dos Rio (Cuba) : « c’est l’heure des brasiers, et l’on doit voir seulement la lumière » (traduction par François Maspero et Franchita Gonzalez-Battle de : « Es la hora de los hornos y no se ha de ver más que la luz »). Phrase que Ernesto Che Guevara reprit dans son « Message à la Tricontinentale » : « Créer deux, trois... de nombreux Vietnam ! ». Solanas et Getino font directement hommage au Che et à Martí dans leur film.

[2] Octavio Getino est mort en octobre 2012 ; il a écrit de nombreux ouvrages, dont El cine de “las historias de la revolución”, co-écrit avec Susana Velleggia et paru chez Altamira (Buenos Aires, Argentine) en 2004 — Le cinéma des histoires de la révolution, (sur le cinéma politique latino-américain de la période 1967-1977).

[3] « La Tricontinentale » désigne la « Conférence de la solidarité des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine », plus brièvement appelée « Conférence Tricontinentale », qui s’est tenue du 3 au 13 janvier 1966 à la Havane, comme nous le rappelait le journaliste Albert-Paul Lentin, présent durant l’événement. Elle a réuni de nombreux représentants des mouvements de libération d’indépendance et/ou révolutionnaires répartis sur trois continents, comme son nom l’indique (Afrique, Asie, Amérique Latine), personnalités officielles du bloc socialiste et des observateurs occidentaux engagés dans la lutte anti-impérialiste. Elle a eu pour objectif de permettre aux participants de tisser des liens de solidarité afin de réagir à l’échelle internationale contre l’impérialisme et le colonialisme et donna lieu à un mouvement de résistance et de solidarité activistes effectifs jusqu’en 1975, d’autant qu’au moment même de cette fondation, la Guinée Bissau et le Cap Vert, le Mozambique et l’Angola n’étaient pas encore sortis du joug portugais, et la guerre du Vietnam devenait de plus en plus meurtrière, l’apartheid existait encore en Afrique du Sud, et la question palestinienne restait toujours à régler. La « Tricontinentale » réunissait deux courants : celui « qui a surgi avec la révolution socialiste d’octobre et celui de la révolution nationale libératrice » (d’après Mehdi Ben Barka, président du comité préparatoire de l’événement — mais qui sera enlevé le 29 octobre 1965 à Paris, son corps disparaissant à jamais, sans doute torturé avant d’être assassiné). Elle représentait donc le versant « révolutionnaire » de la constellation tiers-mondiste. Pour donner voix à ce courant de pensée et d’action, la revue Tricontinental sera créée en 1966, avec plusieurs éditeurs délocalisés dans le monde (le N°1 de l’édition française aux éditions Maspero, en 1970).

[4] (1) English title of the Argentine manifesto film La Hora de los hornos (1968, released in 1973), by Octavio Getino and Fernando E. Solanas. As the author states in his editorial, in fact the title quotes a sentence from the great Cuban revolutionary—and to a larger extent, the Caribbean region— José Martí, a writer of the nineteenth century and military independence fighter who was killed during a charge brought against the Spanish army at the Battle of Dos Rio (Cuba): "It is the hour of the furnaces, and we should only see the light" (...). Phrase that Ernesto Che Guevara put in his "Message to the Tricontinentale": "Create two, three... if not more Vietnam!" Solanas and Getino directly pay a tribute to Che and Marti in their film.

[5] (2) Octavio Getino died in October, 2012. He wrote numerous books, including El cine de "Las historias the revolución," co-written with Susana Velleggia and published by Altamira (Buenos Aires, Argentina) in 2004—cinema on the stories of the revolution (the Latin American political cinema of the 1967-1977 era).

[6] (3) "The Tricontinental" refers to the "Conference of Solidarity of the Peoples of Asia, Africa and Latin America", briefly called "Tricontinental Conference", held from the 3rd to the 13th of January, 1966, in Havana, as recalled by the journalist Albert-Paul Lentin who was present during the event. It was attended by many representatives of the independence and/or revolutionary liberation movements on three continents, as its name indicates (Africa, Asia, Latin America), officials of the socialist bloc and Western observers involved in the anti-imperialist fight. It was intended to allow participants to build relationships of solidarity to respond internationally to imperialism and colonialism and gave rise to an activist movement of resistance and solidarity that has been effective until 1975 while, at the time of its foundation, Guinea Bissau and Cape Verde, Mozambique and Angola had not yet been freed from the Portuguese grip, and the Vietnam War became increasingly murderous, apartheid existed still in South Africa, and the Palestinian question remained yet to be resolved. The "Tricontinental" comprised two trends: one "which emerged with the October Socialist Revolution and that of the liberating national revolution" (according to Mehdi Ben Barka, chairman of the preparatory committee for the event—but just after he was kidnapped on October 29, 1965, in Paris: his body has never been found, probably tortured before being killed). It represented then the "revolutionary" portion of the third worldism constellation. To give voice to this current of thought and action, the Tricontinental magazine has been created with delocated publishers in the world in 1966 (the first issue of the French edition was published by Maspero in 1970).


Octavio Getino y Susana Velleggia, El cine de “las historias de la revolución”

Reply to this article

SPIP | template | | Site Map | Follow-up of the site's activity RSS 2.0